« La guerre ne forme pas la jeunesse, elle la viole. »
Antonin Varenne
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Beyrouth, 4 août 2020 à 18h07. Explosion. Une nouvelle explosion. Puissante, destructrice, terrible, mortelle. Un attentat ? Pire. Celle de trop ? Hyam Yared, à cet instant précis, consultait avec son mari une psy pour tenter de sauver son couple. L’explosion pulvérisera vies, maisons, immeubles mais recollera tant bien que mal le couple et ses enfants. Elle plongera également la narratrice dans une profonde réflexion sur son pays, sur elle, sur son couple, sa famille. Elle s’interrogera sur la place de l’écriture, de l’écrivain dans le Liban et son immersion dans les mots. Partir ? Reconstruire ? Pour qui, pour quoi ? Les discussions dans le couple sont animées, les idéalismes et les peurs s’affrontent. Tenter de répondre à ces questions nécessitent aussi de dresser l’état des lieux du pays, guerres, économie, banques, politiques, relations avec la France... Beaucoup de colère, d’impuissance et des doutes permanents sur le présent et l’avenir, ici ou ailleurs. Hyam Yared avec ce récit, sa colère, sa franchise mais aussi son humour, nous permet de mieux appréhender l’impact de cette explosion et ses conséquences sur le quotidien, les sentiments, les peurs et rêves, les choix difficiles et les hésitations des Libanais.
« Ici, les guerres sont des chansons amères et nos enfants apprennent tout de même à s’aimer. »
« Les mères, c’est comme les fées. Il faut leur faire croire qu’elles ont des pouvoirs pour qu’elles existent. »
« Je lui rappelle chaque fois que, de tous les dangers, c’est vivre qui est le moins mesurable. »
« On n’aide jamais les peuples à s’épanouir, on leur donne l’aumône du développement en les maintenant sous contrôle. »
« Lui dire que ce n’est pas abandonner son pays que de vouloir en guérir. Que ce n’était ni le trahir ni l’oublier que de se permettre de vivre en dehors de sa blessure. Juste se sauver un peu, pour mieux y revenir. »
Fiche #2776
Thème(s) : Littérature étrangère
La grand-mère de la narratrice vient de décéder au Liban en 2006. Avant de repartir en France, elle quitte les « corbeaux » et leurs condoléances pour s’isoler dans un petit boudoir. Elle aimait par-dessus tout sa grand-mère et parmi les carnets, courriers et autres notes de celle-ci, elle la découvre, redécouvre, elle la retient, la prolonge. Sa grand-mère d’origine arménienne a perdu son mari à 31 ans et lui a fait vœu de fidélité comme elle est restée fidèle à sa maison malgré les pressions : une maison située entre Beyrouth est et Beyrouth ouest au centre d’un Liban si multiple. Comme cette maison, cette femme est demeurée ouverte, attentive aux autres quelque soit leur camp, leurs origines. Elle est continuellement restée fidèle à elle-même, sans concession, libre et a aidé sa petite fille à tenter d’acquérir sa liberté dans sa vie personnelle (« Se libérer est aisé. C’est rester libre qui compte. Droit devant c’est un mur. »). Un brillant et brûlant hommage à une femme libre marquée par l’Histoire, représentative d’un Liban ouvert et tolérant, elle respectera ses convictions sur les hommes et sur la vie sans jamais se soucier des conséquences au sein d’un Liban perpétuellement torturé.
Fiche #697
Thème(s) : Littérature étrangère
Premier roman d'une jeune libanaise ayant déjà publié des recueils de poésie. L'histoire se déroule à Beyrouth en 2005 alors que les manifestations se succèdent. Une jeune femme se rend à un casting et l'ouvreuse exige qu'elle laisse son ombre au vestiaire pour mieux appréhender le rôle. Le metteur en scène souhaite qu'elle soit dépouillée de tout et lorsqu'elle reviendra après avoir obtenu le rôle, il aura disparu. Les gens ne font que passer : "Tout le monde s'était volatilisé dans la rue. Avec la foule. Ils manifestaient pour qu'on leur rende la vérité". L'atmosphère est étrange. Elle accepte pourtant de jouer, sans scénario, sans décors mais devant un public toujours plus nombreux. Elle sort des ombres d'une armoire, ombres de femmes qu'elle met en scène avec force et émotion en s'incarnant en elles. Elle nous fait découvrir sa mère qui aurait préféré un fils puis Yolla l'avaleuse d'hommes, Greta violée à 16 ans, Lena serveuse d'un bar, Mona femme battue qui cherche à s'extraire de sa condition. Des destins de femmes dans un monde masculin qui dressent un tableau de la société libanaise contemporaine où les femmes (entre autres) trouvent difficilement leur place. Une découverte.
Premier roman
Fiche #176
Thème(s) : Littérature étrangère