« … il n’y rien à atteindre, il y a à cheminer. »
Nathalie Decrette
Gros-câlin (1974)
Il s'agit du premier roman d'Emile Ajar paru en 1974 : un joli sac de nœuds, joliment bien ficelés, désopilant, tendre et corrosif selon Le Monde de l'époque. Cousin, employé statisticien, vit depuis peu avec un python nommé Gros-Câlin ce qui ne devrait pas être un obstacle pour réaliser son rêve de vie commune avec sa collègue, la belle guyanaise Mlle Dreyfus. L'humour est permanent tant dans le déroulement rocambolesque, les situations déroutantes et la construction du roman que dans l'écriture même Dès la première page, le ton est donné : évitez toute littérature, car le sujet en vaut la peine. Les situations extravagantes succèdent aux discours délirants le tout dans un ensemble réaliste qui dépeint le drame de la solitude, le besoin d'amour mais aussi le droit à la différence.
Romain Gary
Roman Kacew est né le 8 mai 1914 à Moscou. Il ne connaîtra jamais son père et suivra sa mère Nina Borisovskaïa, actrice sans grande renommée, qui s'expatrie en 1927 et s'installe à Nice, elle sera certainement l'ancre de son destin exceptionnel. Cette période entre autres est décrite dans La promesse de l'aube. Son refus ultérieur de lier son destin à un groupe prend racine, son désir de liberté demeurera toujours prépondérant. Les Kacew restent en marge de la diaspora russe et de la communauté juive. Ils vivent tous les deux, l'un pour l'autre et sa mère lui promet déjà un destin exceptionnel : avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais. On est obligé de manger froid jusqu'à la fin de ses jours. Dans ce roman autobiographique, son destin tragique apparaît en filigrane : ses tentations de suicide sont déjà évoquées comme si, ses luttes pour l'espoir et pour la vie n'étaient que façade.
Lutte désespérée, humour et clown triste, ironie et cynisme maîtrisés, liberté, mélancolie, réalisme sont quelques termes qui peuvent qualifier son œuvre. Son fil directeur est certainement la quête de l'identité : Romain Gary tout au long de sa vie changera d'identités, de physiques et n'aura de cesse de brouiller les cartes. Néanmoins cette quête reste bornée par la vieillesse et la mort, deux sujets récurrents de son oeuvre. Sa vision de la vie reste mélancolique, farce désespérée oscillant entre idéalisme et pessimisme. Il admet un état dépressif constant et sa vision sombre de la vie mais l'ironie et l'humour éclairent toujours son discours.
Bibliographie
1945 Education européenne : réflexion humaniste sur la guerre et exceptionnellement optimiste quant à la capacité de l'homme d'infléchir son destin
1946 Tulipe
1948 Le grand vestiaire
1952 Les couleurs du jour
1956 Les racines du ciel (Prix Goncourt, adaptation de John Huston) : souvent identifié comme le premier roman écologique (défense des éléphants en Afrique envers et contre tout et tous) mais l'Homme, ses comportements et motivations en sont aussi les points centraux face au combat enragé et déterminé d'un homme désintéressé
1958 L'homme à la colombe (Fosco Sinibaldi)
1960 La promesse de l'aube (adaptation de Jules Dassin) : autobiographie permettant d'apprécier en particulier les relations de Romain Gary avec sa mère.
1961 Johnnie Coeur
1962 Gloire à nos illustres pionniers (ou Les oiseaux vont mourir au Pérou)
1963 Lady L (adaptation de Peter Ustinov)
1965 Pour Sganarelle
1966 Le mangeur d'étoiles
1967 La danse de Gengis Cohn
1968 La tête coupable
1969 Adieu Gary Cooper
1970 Chien blanc : roman autobiographique sur fond de racisme aux Etats-Unis. Chien blanc est le nom donné aux chiens policiers dressés pour attaquer les Noirs. Un dresseur inverse le comportement d'un chien blanc.
1971 Les trésors de la mer rouge
1972 Europa
1973 Les enchanteurs
1974 Gros-Câlin (Emile Ajar),
La nuit sera calme,
Les têtes de Stéphanie (Shatan Bogat)
1975 Au-delà cette limite votre ticket n'est plus valable : les troubles psychiques des hommes devant la perte annoncée de leurs capacités sexuelles l'âge avançant.
La vie devant soi (Emile Ajar, adapté au cinéma par Moshe Mizrahi avec Simone Signoret) : l'histoire d'amour se prolongeant au delà de la mort entre Momo je m'appelle Mohammed mais tout le monde m'appelle Momo pour faire plus petit ; Pendant longtemps je n'ai pas su que j'étais arabe parce que personne ne m'insultait. On me l'a seulement appris à l'école et Madame Rosa, vielle juive rescapée qui accueillent les gosses en perdition.
1976 Pseudo (Emile Ajar) : sous forme de règlement de compte avec Romain Gary, le voile commence à se lever sur les motivations ayant conduit Romain Gary à mener cette aventure. La couverture de l'édition originale (cf. site internet de la librairie) montre comment la farce a tourné à l'épreuve.
1977 Charge d'âme
Clair de femme (adapté au cinéma par Costa-Gavras avec Romy Schneider et Yves Montand) : l'amour d'un homme pour une femme, deux êtres dans la détresse et en dérive complète, cette rencontre les sauvera-t-elle ?
1979 L'angoisse du roi Salomon : l'humour triste d'un vieil homme juif arrivé à la fin de sa vie que la mort apeure. Peut-être le plus fou des romans de Romain Gary.
La bonne moitié,
Les clowns lyriques
1980 Les cerfs-volants
1981 Vie et mort d'Emile Ajar (livre posthume)