« Nous mourons si nous n’écoutons pas ce qu’enseigne l’expérience, mais nous moisissons si nous y prêtons trop d’attention. »
Jon Kalman Stefansson
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Dora et Adele vivent à Bologne, au cœur de deux quartiers proches l’un de l’autre et pourtant si éloignés. Adele est très jeune, à peine majeure, habite la cité des Lombriconi côté précarité et pauvreté et s’apprête à accoucher. Dora, trentenaire, partage avec son mari un grand appartement du centre ville et n’a toujours pas résolu son désir absolu d’enfants engendrant tristesse et amertume jusqu’à fragiliser son couple. Silvia Avallone choisit donc de nous faire vivre alternativement aux côtés de ces deux femmes en plein questionnement sur leur maternité avec des visions bien différentes (« Quand devient-on parent ? Quand on le désire, quand on accouche, ou qu’on le veut et qu’on l’affirme ? … C’est quand tu acceptes que ton fils soit un autre, et que tu l’aimes tel qu’il est. »). Adele ne souhaite pas que son enfant vive la même vie qu’elle, devienne inévitablement une perdante prisonnière de son quartier et envisage donc l’abandon. Dora professeur (« Née avec une malformation, mais fière. Bancale, mais déterminée. ») minée par son échec face à la maternité prend le chemin ardu de l’adoption. Le jeune Zeno établit un lien évident entre les deux femmes, entre les deux mondes. Voisin d’Adele, il l’observe débordant d’amour et suit avec brio les cours de Dora. Et Zeno, fin observateur, se décide à écrire cette vie, ce quotidien, ces vies. Il crée ainsi un lien multiple, plus dense, avec ces deux femmes : « Il pouvait raconter la douleur des autres, mais pas leur bonheur. Du bonheur, il était forcément exclu. ».
Après Anna et Francesca puis Marina, Andrea et Elsa, Dora et Adele rejoignent les portraits féminins réalistes et puissants de Silvia Avallone images de l’Italie des années 2000 où les difficultés immenses de vie entravent lourdement les rêves de la jeunesse mais n’empêchent pas chacun de continuer d’espérer en une vie meilleure.
« Parce qu’il y a des forces contre lesquelles on ne peut rien, répondit-il d’un ton détaché. Peut-être plus irréparables encore qu’un désir stupide et égoïste. »
Fiche #2140
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Françoise Brun
Marina, Andrea et Elsa sont originaires d’une vallée perdue, encaissée au plus profond du Piémont. Jadis prospère, elle voit les entreprises fermer et se dépeuple peu à peu. « Ce n’est pas vrai que ce qui compte, c’est où on arrive. Ce qui compte, c’est d’où on vient. » et ces trois là vont l’éprouver. La belle, très belle, Marina, à la voix lumineuse, rêve d’ailleurs, de célébrité, elle sait qu’elle attire les regards et aime en jouer. Andrea après quelques années d’études préfère suivre les pas de son grand-père et exploiter une ferme d’alpage au cœur d’une nature sauvage et fière ; évidemment il n’a d’yeux que pour Marina alors qu’Elsa l’a toujours aimé. Amour impossible. Marina et Andrea dont les relations oscillent entre attirance et répulsion conservent leurs rêves sans oublier leurs racines et leur enfance accompagnés de failles profondes. Un combat pour grandir, un combat pour la liberté mais le prix sera peut-être cher à payer. Portrait attachant et émouvant d’une jeunesse qui vit sans retenue l’amour, l’amitié et ses rêves au cœur d’une société qui va à vau l’eau. Après « D’acier », une superbe confirmation que l’on dévore !
« Mais le fric a un prix, lui aussi. Il veut toujours quelque chose en échange : ton temps, ta fatigue, et surtout un bon morceau de ta conscience. »
« Une sorte de miracle. Une des raisons pour lesquelles on choisit ce genre de vie. Il n’y a ni vacances ni treizième mois, et on ne devient pas riche. Le vrai gain, c’est voir les clients revenir parce que votre beurre, votre tomme, les produits que vous avez fabriqués de vos mains sont meilleurs que les autres ; attendre la naissance d’un veau ; apprendre à lire dans l’étendue du ciel même les signes les plus imperceptibles des saisons, et accorder le rythme de son corps à celui de la terre, sa liberté à la sienne. »
Fiche #1513
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Françoise Brun
Anna et Francesca sont deux jeunes ados italiennes de 13-14 ans du début des années 2000, loin de l'Italie historique ou touristique. Blonde et brune, elles vivent dans une cité ouvrière toscane bâtie autour d’une aciérie omniprésente, personnage à part entière, sorte de monstre aussi amical qu'hostile. On naît là et on y meurt. Anna et Francesca sont unies par une forte amitié, proche de l’amour, et partagent le rêve de s’extraire de cet univers, de transcender leur condition. Elles sont belles, jeunes, attirantes, elles le savent et en jouent dans ce monde qu’elles souhaitent quitter, bien loin du choix de leurs mères qui ont tout accepté. Mais D’acier est aussi le portrait d’une génération et d’un milieu social qui ne croit plus dans le bonheur collectif, un monde désenchanté, sans avenir, sans rêves ou alors limité au dernier modèle de la Golf, qui n’attend guère plus que quelques instants de bonheur volés par ci par là (Carpe diem), moments furtifs d'enchantement à ne pas rater et à saisir absolument. Leur point d’ancrage demeure la famille mais elle aussi est souvent à l’image de la société, en péril. Seule issue donc, l’amitié entre ces deux gamines qu’elles pensent indéfectible... Superbe premier roman ancré dans le quotidien de nos sociétés et animé par de nombreux portraits d’une grande ampleur. Silvia Avallone évite une noirceur pesante par la dualité constante du récit (beauté-laideur, plage-immeubles, Ile d’Elbe-Stalingrado, vie-mort…) mais surtout réussit à l'illuminer par la beauté et l’amitié de deux ados en train de devenir femmes.
Premier roman
Fiche #927
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Françoise Brun