« L’homme n’apprend rien de personne, même des fourmis. Oui. Des fous déguisés en individus en bonne santé, voilà ce que vous êtes, et vous n’êtes pas assez rusés pour avoir peur. »
Giovanni Arpino
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62 instantanés de vie, 62 diapositives de vies souvent niées, oubliées, anonymes avec au centre de l’image, les femmes. Quelques lignes pour décrire, susciter, évoquer. Une phrase qui pourrait paraître anodine, une situation qui pourrait paraître sans conséquence, et l’injustice, la violence, le mépris, la misogynie deviennent évidents. Fabienne Swiatly est experte pour choisir sa focale, pour traduire en image une situation et vice-versa, chaque mot est compté, à sa place. Et comme souvent chez Fabienne Swiatly, les femmes prennent une place prépondérante dans ses billets : avec une extrême sensibilité et humanité et une attention aigue, elle nous parle de celles que certains nomment invisibles, victimes de la précarité, victimes des hommes, exploitées, le combat est permanent et parfois abandonné par lassitude devant sa violence et sa permanence. Celles qu’on sait invoquer, convoquer, quand nécessaire et si souvent oubliées quand la nécessité s’éloigne... Un recueil à mettre absolument entre toutes les mains, mains de femmes, mains d’hommes, mains d’adolescentes et d’adolescents.
Fiche #2988
Thème(s) : Littérature française
La vie et l’écriture ont eu raison de Sylvia Plath : « … elle embrasserait l’écriture comme son chemin de braises, le seul qu’elle puisse vivre. ». Ananda Devi retrace l’itinéraire de Sylvia Plath et Ted Hughes, couple sulfureux de poètes. Deux personnages différents, deux relations à l’écriture différentes. Sylvia est exigeante, perfectionniste, jamais satisfaite, toujours en quête, fragile mais refusant tout compromis. Raturer, recommencer, toujours dans la tension, entre passion et souffrance, s’extraire du monde dominé par les hommes par l’écriture mais au prix de quelle souffrance ? Ils avaient tant en commun pour finalement arriver à une certaine incompréhension, elle se retrouvera « seule, nue et sans défense, face à sa lutte intérieure. » et il ne restera qu’à Sylvia l’écriture et la souffrance, « …Sylvia, s’est elle-même dévorée, ne s’étant pas octroyée le droit de vivre. », jusqu’à la mort. Intense et tragique.
Ecouter la lecture de la première page de "Sylvia P."Fiche #2946
Thème(s) : Littérature étrangère
Fabienne Juhel est une spécialiste de Tristan Corbière, une thèse, commissaire d’une exposition, responsable du contenu d’un site officiel… Alors quelle jouissance certainement d'avoir pris en main son destin, décidé de ses rencontres, maîtrisé ses aventures et tenu son crayon. En effet, dans « La Mâle-mort entre les dents », Fabienne Juhel métamorphose Tristan Corbière en poète reporter de guerre et le charge de rendre compte d’une page noire de l’histoire, en pleine guerre de 1870, la France sacrifiera des milliers de Bretons, ses « Nègres blancs ». A Conlie, Tristan, homme malingre exempté de service militaire, bien loin de l’archétype du combattant, réussira à s’introduire, « Un trublion au milieu des troufions. », dans le camp auprès des Bretons venus s’engager pour combattre les Prussiens. Ils ne connaîtront que la boue, le froid, la maladie, la faim, des armes qui n’en sont pas, le mépris absolu des généraux... Mais la plume de Corbière, ses mots, sa poésie mais surtout ceux de Fabienne Juhel, sont là pour en rendre compte, rappeler la trahison de la République et pour que tous ces Bretons ne restent pas des « morts pour rire ». Ne reste plus au lecteur qu'à prolonger son aventure de lecture par la (re)découverte du poème de Tristan Corbière, « La pastorale de Conlie ».
Ecouter la lecture de la première page de "La Mâle-mort entre les dents"Fiche #2492
Thème(s) : Littérature française
En 1994, lorsque Nelson Mandela prononça son discours d’investiture en récitant un poème « L’enfant n’est pas mort », il stupéfia l’assemblée qui s’interrogea sur son auteur : « Elle s’appelait Ingrid Jonker. Elle était à la fois poète et Sud-Africaine. Elle était à la fois une Afrikaner et une Africaine. Elle était à la fois une artiste et un être humain. Au milieu du désespoir, elle a célébré l’espoir. Face à la mort, elle a célébré la beauté de la vie. » Nelson Mandela n’a évidemment pas choisi ce texte et cette auteur par hasard. Naturellement, leur combat ne font qu’un et la fulgurance, la simplicité et l’évidence des textes d’Ingrid Jonker ont participé à sa survie dans les geôles sud-africaines, « il s’est acheté du rêve avec du rêve. Telle est l’exacte définition du captif. » et continuent de l’habiter.
Nimrod avec une écriture recherchée et poétique tisse les portraits de ces deux résistants qui s’entremêlent ou s’enchaînent : ils sont tous les deux Sud-Africains, un homme et une femme, un noir et une blanche (« La société sud-africaine est ainsi faite que le bonheur est blanc et le malheur, noir. »), le rêve le sauve en prison et « elle est nostalgique du rêve à l’état pur », tous les deux abhorrent l’apartheid, il passa de longues années en prison, elle chercha à rompre avec sa prison familiale, il survécut à l’apartheid, elle s’y noya. Ils choisirent la justice, l’égalité, la fraternité et la liberté et ils en souffrirent tous les deux. Nous découvrons Ingrid Jonker et retrouvons avec un immense plaisir à travers les mots choisis de Nimrod le visage souriant même avec une larme à l’œil de Nelson Mandela. Nimrod nous passionne en entrelaçant ces deux destins issus de camps opposés et qui décideront de rester debout au-delà des conséquences, d’affronter un système oppresseur en évitant toujours la violence, en choisissant le camp de l’intelligence et de la poésie. Lecture obligatoire pour tous !
« L'espèce humaine est fort patiente »
« Il ne cessera jamais d'être un bagnard. Ce n'est pas seulement le regard des gens qui le lui rappelle, ce sont aussi ses souvenirs. »
Fiche #1926
Thème(s) : Littérature française
- Swiatly - Devi - Juhel - Nimrod