« Rien n'est plus émouvant qu'un couple de vieillards vu de dos. »
Pascal Garnier
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Eric BONNARGENT
Les désarrois du professeur Mittelmann
Les Editions du Sonneur
8 | 278 pages | 29-08-2023 | 18€
C'est inédit : le professeur Mittelmann en ce jour de début septembre 2020, pour la première fois depuis trente-trois ans, ne prend pas le chemin de son lycée d’affectation. Professeur de philosophie en retraite. Alors il nous fait revivre ses études, son cursus, son entrée dans l’éducation nationale, les différents établissements où il sera nommé mais aussi ses cours. Prétexte à présenter les grands concepts philosophiques au programme : le propos est vif, imagé, agrémenté d’exemples souvent drôles. Il sait intéresser ses élèves (donc ses lecteurs) même les plus rétifs. Il nous fait également partager son intimité, ses exploits et ses drames amoureux, sa vie d’écrivain puisque Mittelmann est aussi romancier. Le propos n’épargne personne (sauf lui) : ses collègues enseignants ou romanciers, le monde éducatif, le monde littéraire, un brin désabusé et désenchanté, abandonnant ses illusions initiales sur la vie, sur l’enseignement, sur le monde, solitaire, mais jusqu’au bout, il gardera néanmoins l’envie de transmettre et d’éveiller curiosité et interrogations des élèves, un prof qui marquera ses élèves et Justine pourra en témoigner !
Premier roman
« Réussir là où je ne voulais pas réussir, échouer là où je voulais réussir. »
« C’est ça, être vieux : être d’attaque à l’aube, quand il n’y a plus rien à attaquer… C’était cela aussi, vieillir : devenir peu à peu étranger au monde. »
« … l’objectif étant toujours de tuer le temps avant qu’il ne nous tue. »
« Sans n’était-ce donc que cela, le bonheur : l’évitement du malheur. »
« … ce n’est pas moi qui choisis les programmes, ce sont de vieux messieurs, des pédagogues professionnels, bien contents d’eux-mêmes, qui n’ont pas vu d’élèves depuis des dizaines d’années… »
Fiche #3080
Thème(s) : Littérature française
Un homme et sa grand-mère, une jeune fille, une grand-mère disparue, la narratrice et surtout la Nature forment les personnages principaux de ce conte aussi noir que lumineux. Les humains rescapés font partie des invisibles, derniers survivants d’un monde disparu après une catastrophe (« Nous étions la première génération du Grand-Oubli »), des parias isolés dans une nature qui reprend ses droits. Une nature à double facette aussi belle et douce que sauvage, violente et dangereuse. Comment la vie, l’amour et la mort peuvent continuer de s’y exprimer dans leur pureté originelle ? Entre noirceur et lumière, entre humanité et animalité, un terreau parfait pour construire un conte qui suggère, qui expose un chemin vers une sérénité originale de vie, convoque les silences pour mieux faire ressentir une nouvelle philosophie de vie avec le temps qui passe vers une issue connue de tous, « Nous sommes tous de passage. Simplement de passage. »
Premier roman
« Nous sommes des dieux qui ont reçu la beauté en héritage. La splendeur de la jeunesse est éternelle. Seuls comptent le plaisir de l’effort et celui d’être là. Simplement là, ici et maintenant. Seulement la puissance de l’instant, Igor et la taïga. Ainsi passent les années. »
Fiche #2128
Thème(s) : Littérature française
Deux plaisirs en un avec ce court texte : un nouvel opus dans la collection « Ce que signifie la vie pour moi » des éditions du Sonneur et nos retrouvailles avec Jérôme Lafargue ! Belle réussite ! On retrouve la belle écriture précise de Jérôme Lafargue, son amour pour la nature, la forêt et les arbres propices aux mythes et aventures. Cette fois, il quitte la fiction pour un récit autobiographique. Néanmoins, le lecteur peut ignorer ce basculement tant l’écriture, les descriptions, et la thématique l’emportent et le propos devient vite universel. Une forêt, un père, un fils, des relations distendues et une dernière promenade. Alors pour l’écrivain, avec son histoire, mais aussi sa passion pour l’écriture (« Ecrire est une sublime maladie dont on ne peut se débarrasser. ») et la lecture, il est temps de nous faire revenir sur ce lieu, source de toute son inspiration et qui restera à jamais lié à son père (« Mon âme d’enfant ne s’est pas perdue dans ces bois ce jour-là. Au contraire. Les plus sensés d’entre nous continuent de voir le monde avec leurs yeux d’enfant. ») et à son enfance. On est donc bien loin du témoignage larmoyant ! L’émotion et l’attention du lecteur demeurent à leur acmé de la première et la dernière page !
« Ni imagination ni originalité ici, parler de la vie c’est parler de la mort, les deux choses les plus absurdes et inconséquentes qui soient. »
« Vivre est absurde, alors qu’écrire, non. »
Fiche #1966
Thème(s) : Littérature française
La jument de Socrate
Les Editions du Sonneur
5 | 120 pages | 07-06-2017 | 15.5€
Socrate fut mariée à Xanthippe, une femme beaucoup plus jeune que lui que l’histoire a oubliée. Pourtant, alors que Socrate est condamné à boire la ciguë, c’est elle qui parcourt, comme une jument folle, Athènes, la ville à qui Socrate a tout donné, pour tenter d’obtenir une révision de son procès. Le lecteur accompagne Xanthippe dans une visite guidée de la ville, de sa justice, de son monde intellectuel, du déroulement du procès. Elle aimerait tant le sauver (« Le jour où on écoutera une femme n’est pas venu encore. »), lui, qui lui a accordé une vraie place dans leur intimité (« Grâce à lui, elle était épouse et mère, mais aussi quelque chose de plus, elle ne saurait dire quoi, ni comment cela s’était fait. ») en permettant une relation équilibrée. Elle espère plus que tout continuer de l’écouter, encore et encore. Le portrait érudit d’une femme amoureuse, en colère, pleine de fougue, déterminée à livrer combat, une femme libre déjà si moderne.
« Pourquoi se mettre en peine du vulgaire et de son opinion ? »
« La beauté est-elle dans la chose regardée ou dans l’œil qui regarde ? »
« Une liberté dont on ne fait rien, est-ce encore liberté ? »
Fiche #1962
Thème(s) : Littérature française
Moïse Chant-d’Amour a fait découvrir à Saturnin, le narrateur, un vieil entrepôt délabré où il se sent immédiatement chez lui et décide de le rénover pour en faire un parc d’attractions, « Pas seulement un anti-Disneyland mais aussi et même surtout un anti-Bayreuth. », où musique classique et opéras, les sauveurs de l’humanité, règneront. L’aventure peut commencer et quelle aventure ! Tout est en effet possible dans ce lieu habité par une foule bigarrée et extravagante et surtout si vivante, des êtres en marge de la société bien pensante, des sans voix qui apparaissent dans toute leur humanité avec leurs qualités et leurs travers. Cet endroit insalubre devient pierre après pierre quasiment habitable, l’entraide devient la règle, la vie ensemble s’installe. Ils s’acceptent dans ce lieu partagé, un endroit à eux où la lumière brille. Un premier roman fou, lumineux et truculent où l'homme retrouve sa place.
Premier roman
Fiche #1769
Thème(s) : Littérature française
Le temps est venu de se confier. Margarine dans un dernier souffle se doit de revenir sur son parcours, de la Tchécoslovaquie, en passant par Berlin au moment de la chute du Troisième Reich, jusqu’à Paris en tant que baronne. Adolescence chaotique (« Dès mon plus jeune âge, j’avais été battue, bâtie pour la soumission ; un monde sans moi ni lois ! »), elle quitte son oncle et sa tante pour tenter de retrouver sa mère. Elle la découvre mourante et prostituée. Elle sera sa remplaçante et envoyée dans un camps de soldats français SS. Elle y rencontre l’horreur et l’amour. Livrer ses souvenirs, sans retenue, sans filtre, dans l’urgence (« Tout se bouscule, un passé à écrire, un avenir compté… Nuits blanches pour pensées noires. »), la fin étant proche, les mots semblent peut-être enfin la libérer (« Je prie le lecteur de bien vouloir excuser mon ton acerbe et ce chaos. Ils cachent ma nudité face à la vie, mon impuissance aussi. Le temps est venu… ») mais surtout partager ses sentiments, son impuissance, sa soumission définitive. La langue est crue, percutante, parfois aussi violente que les faits décrits. La guerre est une horreur, les sentiments qui animent ses acteurs inhumains et apocalyptiques. Les guerres propres n’existent pas !
Premier roman
Fiche #1719
Thème(s) : Littérature française
Depuis qu'elle est morte, elle va beaucoup mieux
Les Editions du Sonneur
2 | 72 pages | 03-10-2015 | 12€
en stockLa mort flâne et prend parfois son temps, et regarder sa mère emprunter ce long chemin dont l'issue est prédéterminée, absolue et non négociable est aussi souvent interminable. C'est la mort. C'est la vie. Et l'observateur sait qu'il suivra le même chemin, demain ou un peu plus tard, comme dans un miroir, c'est en effet aussi sa mort, qu'il observe à travers cette femme qui s'éloigne, et qu'il accepte peu à peu (« Finalement, rendre visite à ses parents âgés, c'est venir les regarder mourir et s'habituer à cette pensée atroce de leur propre dénouement et de notre vie sans eux qui étaient notre dernier rempart. »). Mais quoi de plus commun ? Franz Bartelt décrypte presque sereinement ces moments où la vie continue tout en étant déjà disparue, où sa mère vagabonde en attendant sa fin de vie, « cette décrépitude, cette immense fatigue qui confine à un genre de folie tranquille, d'éloignement du quotidien. ». Longue période éprouvante où tout s'estompe, et s'éloigne tranquillement. Sans révolte, avec réalisme et parfois même avec humour, Franz Bartelt regarde la mort en face, n'engage pas le combat, analyse les passages obligés, la diminution des facultés, la déchéance, la faiblesse, la folie jusqu'à envisager sa propre mort sans jamais oublier que « toutes ses vies finissent par avoir été belles, parce qu'elles ont été vécues jusqu'au bout... »
Ecouter la lecture de la première page de "Depuis qu'elle est morte, elle va beaucoup mieux"Fiche #1704
Thème(s) : Littérature française
Lionel-Edouard MARTIN
Mousseline et ses doubles
Les Editions du Sonneur
1 | 295 pages | 30-10-2014 | 17€
Mousseline quitte (enfin) son père pour partir découvrir le bébé de son frère jumeau. Voyage sans retour. Elle rencontre en effet une ville, une autre vie et même un Joseph Pigeon parisien et l'amour. Elle s’y installe et doit alors s’occuper de son petit neveu Daniel. Des années plus tard, pour devenir écrivain, il entreprend de conter son histoire, leur histoire, lui, son « presque fils », parcourt cette saga familiale au cœur de la France des années 1950-1960, portrait d’une France loin des paillettes et du pouvoir, mais une France vraie, tout en « pudeurs taciturnes » qui accompagnent les drames de la vie. Un portrait émouvant, aussi triste que lumineux, d’une femme fragile et volontaire et emportée par la vie, sublimé par l’écriture de L-E Martin, poétique et sensible, tout en retenue. Il varie et adapte les styles, du parler populaire au précieux, toujours juste et précis, il sait évoquer et réussit à tenir en haleine le lecteur tout au long de cette aventure humaine et populaire. Une très belle découverte.
Ecouter la lecture de la première page de "Mousseline et ses doubles"Fiche #1541
Thème(s) : Littérature française
- Bonnargent - Roux - Lafargue - Laureau-Daull - Gourvil - Lemiale - Bartelt - Martin