« La guerre ne forme pas la jeunesse, elle la viole. »
Antonin Varenne
Vous appréciez nos comptes-rendus, vous souhaitez nous soutenir mais vous n'avez pas la chance d'habiter aux alentours de Vaux-le-Pénil, tout n'est pas perdu ! Vous pouvez commander l'ouvrage de votre choix sur le site LesLibraires et choisir Vaux Livres comme librairie indépendante. Nous nous ferons un plaisir de vous livrer au plus vite. Nous comptons sur vous. |
« Mariette nous abandonna un dimanche après la messe ». La Réunion, 1974 : quatre enfants quittent leur mère. Elle avait bien du mal à les élever seule, et la France de la Vème République, celle de de Gaulle et de Michel Debré, celle du Bumidom de triste mémoire, lui propose de l’aide. On promet à ses enfants des vies et des carrières brillantes, de celles qui ne peuvent exister qu’en métropole.
Les campagnes françaises manquent de bras. Les deux aînés trouvent « preneurs » les premiers. Et puis un jour les Brouillet, Thénardier modernes, emmènent Marie-Thérèse et Joseph à la ferme… Une chance ! C’est rare que deux enfants d’une même fratrie soient accueillis ensemble. Le lendemain même de leur arrivée commence le travail et il en faut peu pour que René Brouillet perde patience… Aux « rassin anler » (déracinés), il est interdit de parler créole, de communiquer avec sa famille biologique. Ainsi Mariette, malgré ses demandes, n’aura pas de nouvelles de ses enfants. Michel, Patricia, Marie-Thérèse et Joseph, devenus Frédéric, Magalie, Marie et Florent, n’auront pas davantage de nouvelles de leur mère. C’est Marie-Thérèse, la narratrice qui fait le récit à la première personne, depuis l’enfance en Creuse où elle et Joseph sont en famille d’accueil, jusqu’au retour à Saint-Denis de la Réunion, en 2018. On retrouve alors la fratrie réunie autour d’une commémoration : le 25è anniversaire de la mort tragique de Joseph. On lit ses poèmes publiés désormais avec succès.
Comme ceux du roman, fictifs mais si réels, plus de 2000 enfants réunionnais, seront transplantés (car dire « déportés » reste difficile, même aujourd’hui), entre les années 1960 et le début des années 1980 dans 83 départements de métropole. Leurs souffrances sont à nouveau dévoilées avec ce récit sensible.
Christine J.
Premier roman
« Quel type de stylo utilise-t-on pour vendre une vie ? Un stylo Bic ? Un feutre noir ? Je me demande si ce stylo existe encore quelque part. »
« La rancœur est un manteau dont on ne se défait jamais tout à fait. J’ai essayé de le retirer, mais ses manches me sont restées aux poignets, comme des menottes desquelles je ne pouvais me libérer. En relatant ces chapitres de ma vie, j’espère être soulagée du poids de cet habit. »
Fiche #3260
Thème(s) : Littérature française
« Ne pas parvenir à t’en vouloir... Je me suis longtemps fait mal pour ne pas t’en faire. » : Vers la violence est le long chemin d’une femme pour sortir d’une violence héritée d’une enfance et de son père. Petite fille, Lou avait une fascination mêlée de peur pour Gérard, un père trouble, ancien policier, toujours armé et prêt à dégainer, un homme, un vrai, pas une fillette. Fascination pour la virilité malsaine, fascination pour la violence, mais aussi charmeur, conteur et enjôleur capable d’hypnotiser sa victime, froid et dangereux comme un serpent venimeux. Un homme au passé étrange, sa première femme et ses enfants sont morts, un homme qui peut basculer dans la violence soudainement, à n’importe quel moment (« Sa violence, inassouvie depuis l’aube de la vie, cherchait une victime de rechange, n’importe laquelle, à condition qu’elle soit vulnérable et passe à portée. »), peu importe celle ou celui qui est présent à ce moment, mais un homme surtout qui, par son emprise, emporte avec lui sa fille sur ce chemin de la violence. Cette enfance a naturellement un impact puissant sur ses relations futures aux autres, ses relations aux hommes, ses relations aux corps, une femme qui s’est habituée et réclame la menace permanente pour vivre. Même en dansant, elle recherche la douleur et la souffrance. Sa rencontre avec Raphaël marquera un premier tournant, ce qui lui permettra de danser et d'appréhender son corps différemment puis surtout de prendre une décision radicale, une décision de rupture avec cet héritage mortifère, de revisiter les contes paternels et enfin pouvoir regarder le loup dans la forêt avec un œil apaisé et bienveillant (même si un loup aurait été incapable de faire subir à son petit ce qu'elle a enduré du sien). Un long chemin d’une fillette puis d'une femme pour réviser l’héritage qu’elle avait retenu de son père, briser les murs construits par cette enfance, comprendre que pour être la fille de son père elle n’est pas contrainte d’endosser sa violence, un nouveau tri salvateur de cet héritage pour enfin espérer en une vie sereine et apaisée.
Ecouter la lecture de la première page de "Vers la violence"Fiche #2898
Thème(s) : Littérature française
Un livre qui tombe à pic en cette période électorale. Serge Latouche tente de démontrer dans son dernier ouvrage que la décroissance n'est ni un retour aux cavernes ni le symétrique de la croissance. L'environnement devient un enjeu majeur, chacun a pratiquement admis qu'espérer une croissance infinie dans un monde fini est une fuite en avant et notre modèle actuel de développement s'apprête donc à vaciller. Serge Latouche à partir de la notion d'empreinte écologique montre qu'au rythme actuel, les ressources de la planète seront vite épuisées. Le développement durable semble faire écho à ce désastre annoncé mais pour Serge Latouche, même si ces "développements à particule" (développement durable, croissance durable ou soutenable, commerce équitable…) ont permis une amélioration de la compréhension de notre vie actuelle et future, ils représentent finalement qu'un nouvel habillage de la croissance et tentent de rendre son mythe plus acceptable. On ne pourra faire l'économie (...) de la redéfinition des taux, mesures, indices, coûts sur lesquels reposent ce mythe et notre économie : le PIB correspond-il réellement à La Mesure Universelle de la richesse ? Quand les vrais coûts de transport seront-ils intégrés dans les prix (un aliment parcourt en moyenne 2400 km avant que vous ne l'ingurgitiez) ?... Le pari de la décroissance est de marquer une rupture nette avec le consumérisme à outrance et le mythe fondateur de l'économisme qu'est la croissance sans pour autant abandonner richesse et bonheur, notions qu'il faudra cependant peut-être redéfinir…
Fiche #195
Thème(s) : Littérature française