« La vérité est tout ce que les images ne disent pas. »
Alessandro Piperno
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Un carnaval peut-il éclairer d’une lumière singulière et joyeuse la banlieue ? Ou ne restera-t-il que le défilé furtif de personnages bigarrés dans un monde à part avec clown triste en tête ? Hector Mathis renoue dans « Carnaval », « autopsie d’un vertige », avec Sitam personnage de son premier roman déjà percutant « K.O. ». Avec ce sentiment « d’avoir été présumé coupable toute mon enfance... », il s’est éloigné de ses amis mais ressent déjà son erreur. Alors qu’il recherche Capu sa compagne, il apprend la mort de l’un d’eux et revient sur les lieux de son adolescence. Retour sur le passé, sur l’enfance, ajustement du présent. Il revient avec une banlieue (« Foutue résidence à suicides ») qui a continué de se dégrader, mais il n’est plus seul. La maladie l’accompagne. Il est condamné depuis l’âge de vingt ans (« Mort vivant dès la vingtaine. »), une sclérose et toutes ses conséquences au quotidien. Ce retour est prétexte aux souvenirs de l’époque de cette amitié fraternelle puissante, de leurs folles aventures, de leurs dérives, de leur vie en marge, de leur précarité mais une époque où ils rêvaient encore, surtout ensemble, toujours ensemble même si « On était coupables, pour sûr ! Infréquentables ! Mauvais ! Nuisibles ! ». Le constat est lucide, direct et donc se mue en cri de rage contre la société, contre la maladie, contre les hommes, cri de désespoir, parfois débordant de larmes mais au milieu de rires de ces adolescents débordant néanmoins de vie. Un style en total adéquation avec ce cri dans l’urgence, percutant, musical, rythmé. Le « K.O. » est brillamment confirmé !
« Moi je suis banlieusard à tout jamais. Paris me recrache chaque fois qu’elle tente de m’engloutir. Elle me régurgite. »
« Le produit c’est l’homme. Un sac de viande avec une connexion Internet. Bourré de frustrations. »
« L’homme, c’est un singe ! Un singe plus doué que les autres mais doué pour quoi ? La violence et la prétention ! Rien de plus... »
Fiche #2572
Thème(s) : Littérature française
Sitam partage la cabane brinquebalante d’Archibald, un amoureux fou du jazz qui vit en marge, reclus, chassé du monde qui parlera de lui avec retenue mais surtout écoutera Sitam lui confier son histoire et dévoiler sa trajectoire au cœur de la précarité et de la guerre. Sitam est maintenant posé mais fuit depuis quelque temps. Il s’est évadé de Paris après un attentat pour parcourir l’Europe en plein chaos. Un passage en Hollande où il constitue avec amitié une petite bande que sa maladie éclipse. Elle l’incite en effet à reprendre la route, et il ferme la boucle en revenant en banlieue. Portrait d’un jeune homme qui abhorre son époque et sa société, qui choisit l’errance dans un monde en perdition et qui trouve son seul refuge dans la musique et les mots. Le texte est vif, nerveux, un flux constant le traverse, une poésie et une musicalité permanentes, le tout prend à « l’estomac » en abordant de front la vie, la maladie, la mort, l’amitié, la solidarité, la tendresse et le désespoir. Vous n’échapperez pas au KO !
« Pour continuer à traquer la beauté, faut beaucoup de silence… »
Premier roman
Fiche #2250
Thème(s) : Littérature française