« La vérité est tout ce que les images ne disent pas. »
Alessandro Piperno
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A sa naissance, Lula Ann Bridewell, est noire, superbement noire mais pour ses parents, terriblement noire. Son père quitte le foyer familial immédiatement et sa mère garde ses distances, ne fait guère preuve d'amour et l'élève durement. Pour prouver son amour et attirer l'attention de sa mère, Lula commet un mensonge lourd de conséquences qui l'accompagnera toute sa vie. Puis Lula prend son envol vers la vie, devient Bride, joue avec sa beauté, multiplie les rencontres jusqu'à celle avec Booker qui pourrait être la bonne… Toni Morrison continue de tracer son chemin et retrouve ses sujets favoris, comme les traumatismes de l'enfance, le mensonge, la revanche, le racisme et la différence... Une série de thèmes propices à l'enfermement mais aussi, et heureusement c'est ici le choix de Toni Morrison, à la délivrance, et chacun des personnages principaux de ce dernier roman, in fine, accédera malgré les obstacles à la sienne. Toujours aussi puissant !
« Il soupçonnait que la plupart des vraies réponses concernant l'esclavage, le lynchage, le travail forcé, le métayage, le racisme, la Reconstruction, la ségrégation, le travail pénitentiaire, les migrations, les droits civiques et les mouvements de Révolution des Noirs avaient toutes trait à l'argent. Argent retenu, argent volé, argent comme pouvoir, argent contre guerre… La haine qu'éprouvaient les Blancs, leur violence, était le carburant qui faisait tourner le moteur du profit. »
« Le soleil et la lune se partageaient l'horizon dans une amitié distante, aucun n'était décontenancé par l'autre. »
« Le monde politique était une abomination, ses militants, à la fois les rétrogrades et les progressistes, semblaient rêveurs et mal avisés. Les révolutionnaires, armés ou pacifiques, n'avaient aucune idée de ce qui devrait se passer une fois qu'ils auraient "gagné". Qui gouvernerait ? Le Peuple ? Ben, voyons. »
Fiche #1705
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Christine Laferrière
Dans ce court roman, Frank Money se confesse d’un passé qui continue de le miner. La guerre de Corée est venue fracasser cet homme et amplifier la déjà puissante violence qui écrasa une enfance douloureuse dont la seule lueur fut sa petite sœur adorée. Dans leur tout jeune âge, ils assistent à un évènement horrible et fondateur et subissent la haine des blancs et du KKK envers leur quartier noir. Aussi des années plus tard, lorsqu'il reçoit des nouvelles alarmantes de sa sœur, il n’hésite pas un instant, il traverse l’Amérique encore ségrégationniste et vient la rejoindre pour retrouver les traces de leur enfance. Le retour est donc double, voyage dans l’Amérique et voyage intérieur. Recréer ce tandem fraternel avec sa soeur, revenir sur ses souvenirs et son passé, sur cette culpabilité et haine de soi qui le détruisent, tenter de faire la paix avec soi-même et de supporter les atrocités aussi bien subies que commises pour redevenir tout simplement un homme. Court texte, et pourtant la construction est fine et parfaite : Toni Morrison varie les points de vue, Frank parle à la première personne et s’adresse au narrateur (voire au lecteur) puis chaque personnage apporte sa pièce au somptueux édifice que constitue ce conte. Le style est puissant, poétique et musical. Magistral !
« Il lui faudrait se concentrer sur autre chose, un ciel nocturne, sans étoiles, ou mieux, des rails. Pas de paysage, pas de trains, juste des rails, des rails à l'infini. »
« Tu es jeune, tu es une femme, ce qui implique de sérieuses restrictions dans les deux cas, mais tu es aussi une personne. Ne laisse pas Lenore ni un petit ami insignifiant, et sûrement pas un médecin démoniaque, décider de qui tu es. C’est ça, l’esclavage. Quelque part au fond de toi, il y a cette personne libre dont je parle. Trouve là et laisse la faire du bien dans le monde. »
« Le malheur s’annonce pas. C’est pour ça qu’il faut que tu restes éveillée, sinon il franchit ta porte, c’est tout. »
Fiche #1192
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction :
Christine Laferrière